On est content d'apprendre, grâce au Nouvel Obs que les professionnels les plus heureux sont les agriculteurs, infirmières et enseignants. C'est bizarre.
Comme le monde est entrain de sombrer, que rien ne va plus, puisqu’il est entendu que chaque nouvelle génération est mutante, comme il va de soi que la dernière est encore pire que la précédente, puisqu’elle est née, non pas avec une cuillère en argent dans la bouche, mais branchée sur la 3G, la fibre optique, la TNT et youporn, alors, il ne nous reste pas d’autres alternatives : il faut désespérer de la race humaine dans son ensemble.
Pourtant, le Nouvel Obs nous dit que les professions à forte valeur de partage et de solidarité rende les gens heureux...
Mais le pessimisme a gagné : peu importe le soleil, la beauté du monde, peu nous chaut les progrès de la sciences, le fait qu’on vive plus vieux et en meilleure santé. On déprime par habitude, on fait la gueule consciencieusement.
Je déteste cette morosité ambiante. J’ai le sentiment personnel d’aller bien, de vivre dans une société qui n’a rien à envier à celle des années soixante. Je sais ce que je dois, si l’on doit faire les comptes, à cette période, en terme de libertés. J’ai la chance d’avoir incroyablement plus de confort et de facilités par rapport à mes parents.
Ils étaient agriculteurs (donc, heureux), passaient leurs journées à faire un travail éreintant, au premier sens du terme. Ils étaient heureux, malgré tout, ils allaient de l’avant, ils cherchaient sans cesse des solutions pour que leur vie soit douce : travailler 365 jours par an, c’est impossible, incompatible avec une vie épanouie ? Très bien, cherchons des associés, faisons un GAEC, organisons-nous, en CUMA, regroupons les troupeaux, les terres, les emmerdes, les factures. L’agriculture traditionnelle ne paye pas très bien ? Cherchons autre chose, faisons du bio. Oui, au début des années 90, c’était un sacré pari. Mais aujourd’hui, la tonne de lait est bien mieux payé que si on avait cédé aux sirènes de Danone. Il faut savoir aller de l’avant. C’est ce que m’a appris mon père.
Malgré l'enquête du Nouvel Obs, ces derniers temps, on voit souvent des reportages sur les agriculteurs qui se suicident. C’est une profession qui souffre d’un trop grand individualisme. Mon père a lutté contre ça, toute sa vie. Il a réussi à faire un GAEC avec 9 associés, ce qui permet d’aménager un temps de travail correct, avec des week-end et des vacances, ce qui est essentiel pour ne pas être coupé de la société, pour envisager sereinement une vie de couple avec des enfants, par exemple. Je sais que ce n’est pas aussi simple dans toutes les régions : en Savoie, il reste peu d’agriculteur, alors c’est plus simple de se mettre d’accord, il y a de la place pour tout le monde. Dans d’autres coins, il y a encore du monde et les voisins attendent avec impatience que celui d’à côté lâche l’affaire pour racheter fissa du terrain. Cela ne crée pas les mêmes liens, forcément. Et pourtant...il serait tellement plus sain de s’unir, pour avoir plus de terrain, plus d’animaux, pour s’organiser, pour pouvoir créer ses propres filières de transformation, ses propres réseaux de commercialisation pour éviter les grandes surfaces et les multinationales...
Pour être heureux...
CC
J'avais un copain qui était salarié dans un GAEC tenu par ses trois frères. C'était un bordel monstre... Ils n'arrêtaient pas de s'engueuler. Du coup, ils se sont séparés (mon copain était salarié à mi-temps par les deux d'entre eux qui sont restés habiter dans le coin). Ils continuent à s'engueuler et à refuser de collaborer (achat ou prêt de matériel, remplacement pendant les congés)...
RépondreSupprimerSont bizarres, certains paysans...
Oui, c'est pas simple de travailler ensemble, c'est sûr : d'ailleurs, ce n'est pas rose tous les jours, dans le GAEC de mon père (enfin de mon frère, maintenant...) ils sont neufs personnalités différentes et il y a forcément besoin de quelqu'un qui dirige plus ou moins, même si le statut veut que chacun soit le patron...C'est peut-être le noeud du problème, en fait...
SupprimerVous avez dit agriculteurs heureux, je ne vois rien qui laisserait supposer que le bonheur est encore dans le pré !!!Le monde paysan est en plein désarroi, de nombreux jeunes agriculteurs se suicident, le manque de solidarité entre eux peut-être, notamment les gros céréaliers de la Beauce ne font aucun effort pour consentir à leurs "frères " paysans des tarifs plus accessibles qui leur permettraient de survivre et faire face pour partie à leurs problèmes financiers. Pourquoi tant d'indifférence entre un monde agricole qui se voulait pourtant corporatif ? L'appât du gain, des fortunes des gros exploitants se bâtissent sur la mort des petits domaines dans l'anonymat le plus complet. Certains ayant choisi de se regrouper en gaec s'en sortent tant bien que mal, d'autres ayant choisi des filières à "la mode" culture bio ou vente directe, espèrent encore en des lendemains meilleurs. Croisons les doigts pour que toutes ces initiatives soient porteuses d'espoir pour un monde paysan à la dérive.
RépondreSupprimerDésolée mais c'est un peu simpliste... Pour le pratiquer au quotidien je peux affirmer que le monde agricole est impitoyable, solidarité mon cul! Les exploitations (car c'est de cela qu'il s'agit, d'exploitation) doivent être de plus en plus grandes, la surface doit se plier à la dictature des machines elles mêmes de plus en plus énormes. Alors bien sûr il y a de l'entraide, mais contre rénumération, et aussi pour s'assurer une place de choix dans la course à l'obtention des terres de celui qui finira bien par renoncer à se battre. Et là c'est la variante soft, il y a pire, bien pire, certains n'hésitent pas à franchir les limites de la légalité pour accaparer les terres et assoir leur position. Beaucoup d'agriculteurs se comportent exactement comme les actionnaires-chefs d'entreprises qu'ils sont, les lecons du capitalisme sont parfaitement assimilées, maitrisées et appliquées. Alors oui, il est toujours possible d'être heureux, mais ce n'est pas automatique, et il faut se battre, jour après jour, et on est, nous sommes, souvent très très seuls, au milieu de tous ces requins... Quand à la solution GAEC, EARL, bof... Il faut commencer par trouver quelqu'un avec qui partager un minimum d'idées, d'objectifs, dans un monde où le partage ne va pas de soit. Bien sûr que cela pourrait être une solution d'avenir, reste à espérer que l'avenir ne rattrape pas le présent, et que l'agriculteur ne se retrouve pas vraiment tout seul sur tous ses hectares, sans plus personne avec qui partager quoi que ce soit...
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