Une amie qui est enceinte me disait l'autre jour qu'elle avait l'impression de voir des femmes enceintes partout. Je crois qu'on peut parler du "syndrome de la femme enceinte". Tant qu'on n'est pas enceinte, on n'est pas concerné, on n'y prête pas attention.
Hier soir, à une conférence sur l'homosexualité avec Jacques Fortin et Stéphane Lavignotte, quelqu'un a fait la remarque qu'en ce moment, on ne parlait que d'homosexualité, qu'on ne voyait que des homos partout. Je crois que cela relève du même principe : quand on ne parle pas d'un sujet d'habitude, dès qu'on en parle un peu, on a l'impression qu'on ne parle que de ça.
N'empêche, plus le temps passe, plus je pense que le mariage gay, contrairement à ce que peut penser Jacques Fortin (et les vieux militants), ce n'est pas une manière de faire entrer l'homosexualité dans une sorte de conformisme bourgeois qui sent l'antimite. Je ne suis pas sûre que ce soit juste une demande d'égalité, une question de droit, comme le pense un peu Stéphane Lavignotte (et les militants du PS).
Je crois que c'était en fait une provocation utile, un acte militant fort. C'est au vu des réactions que l'on peut dire, d'ailleurs, que c'est une provocation réussie.
On est bel et bien dans la défense d'une utopie, puisque le mariage pour tous, c'est aussi une attaque contre le mariage, tout comme le fut le droit au divorce et avant cela, la reconnaissance des enfants nés hors mariage. Finalement, dans une société où l'on divorce si facilement, où l'on vit de plus en plus en union libre, c'est bien la moindre des choses de transformer l'institution du mariage en un simple droit.
Ensuite, les réactions, même si elles ont été violentes, ont permis de mettre au jour l'homophobie. On l'avait presque oubliée. On s'était habitué à dire "Bah ! Les gens se sont habitués, ils le vivent bien, c'est plus un problème." Même si moi, bien sûr, je savais bien ce que cela représentait, au quotidien : les petites humiliations, de la copine qui te dit que tu ne peux pas comprendre sa relation compliquée avec son mec à la vendeuse d'appartement qui te parle déco et rideau quand tu lui demandes désespérément des détails sur les prises électriques, les invitations "en couple" du boulot où tu te fais porter pâle, les blagues sur les homos où tu sers les poings sans rien dire, les regards insistants dans la rue quand on se promène à deux, les toujours très délicats : "Tu es lesbienne ? C'est parce que tu n'as pas encore passé une nuit avec moi..."
Mais là, les non-dits ont disparu #pourtous : on sait à quoi s'en tenir, et pas seulement nous, les homos. Seuls ceux qui ne veulent rien voir peuvent faire semblant de l'ignorer : l'homophobie est bien présente. Même Frigide Barjot retire ses marrons du feu et se barre sur la pointe des pieds, effrayée par ce qu'elle a fait apparaître. Je pense qu'elle est sincère quand elle dit qu'elle n'est pas homophobe, dans le sens où ce n'est pas l'homosexualité qui la gêne, mais une sorte de bigoterie qui l'empêche d'imaginer le mariage de manière civile. Mais elle s'est acoquinée avec des violents...
Bref, on connaît désormais les ennemis : la classe sociale bourgeoise, qui est descendue dans la rue, parrainée sans surprise par l’Église catholique, mais aussi les petits cons incultes sur twitter et facebook, nourris d'une religion mal digérée qui fait du mâle dominant le plus fort. En un mot, les tenants d'une vision de la société traditionnelle comme sur les affiches de la manif pour tous : le papa plus grand que la maman, le grand frère plus grand que la petite soeur...
Tout ce que le débat a soulevé est éminemment politique : il s'agit de notre vision du monde, de notre organisation de la société. Mais comme me disait un vieil homme, hier soir, avant la conférence : "C'est un combat pour vous les jeunes, parce que pour ma génération, c'est rappé : comment voulez-vous parler de tout ça avec des gens qui n'ont pas encore tout à fait digéré qu'on donne le droit de vote aux femmes...?"
On a du boulot...
CC
des dissensions apparaissent entre les évêques qui se rendent compte que le réac 23 a clivé les chrétiens dont 1/3 s'élèvent contre l'absence de dialogue dans l'église
RépondreSupprimeron est pas au bout des retombées
Oui, il ne faut pas mettre tous les cathos dans le même panier, loin de là. Je lis parfois l'hebdomadaire La Vie et franchement, il y a aussi ceux qu'on entend pas dans les grands médias, plus proche me semble-t-il de l'esprit de Jésus rendant visite à Marie Madeleine !
SupprimerLe droit au mariage des homos retire, quoi qu'on en dise, un droit aux bourges de ma connaissance. Celui d'annoncer avec fierté que leurs enfants sont "bien" mariés avec des conjoints "normaux".
RépondreSupprimerSi tout le monde peut se marier, où sera la différence ? (et je t'assure que pour certains c'est très important)