«Quelle heure il est ?»...
C’est la voix pleine de sommeil et de tabac froid qui résonna dans l’obscurité vide de la chambre d’un inspecteur de police parisien...
Il était 3 heures du matin, ce 14 août 2010, lorsque le portable de Valandier avait sonné.
A l’autre bout du fil, le commissaire, haletant, perturbé comme jamais, essoufflé comme s’il avait dû se taper la Tour Montparnasse par les escaliers...
«Filez tout de suite à l’Elysée. Ne dites à personne où vous allez.»
Il n’avait personne à qui raconter quoi que ce soit, l’inspecteur bouffi de sommeil. L’Elysée ? Il a fait répéter le commissaire, parce qu’il n’était pas sûr d’avoir bien compris :
« - Les Champs ? Euh...L’Elysée, vous êtes sûr...
- Bon Dieu, puisque je vous le dis, hurla le commissaire.»
A cette heure-là, ça réveille. Mieux qu’un café ou qu’un concert d’ACDC.
Alors c’est parti pour l’Elysée.
En chemin, il eut le temps de cogiter. Il pensa à la femme du président : elle est actrice, elle est dans le showbiz, alors on ne sait jamais ce qui peut arriver. Une histoire de mœurs à traiter en douceur ? Pourquoi pas...
En arrivant sur place, pourtant, il lui sembla tout de suite que c’était plus grave. Plusieurs voiture de police étaient déjà là. Il régnait un climat oppressant : un silence pesant, des regards graves.
Il rejoignit le commissaire, qui tenait déjà une réunion avec plusieurs hommes, dans la cours du palais. Le patron fit un signe de la tête en voyant Valandier. Il continua de parler :
«Donc, nous sommes d’accord : pas un seul mot, à personne, en attendant les ordres du dessus. Vous savez comment ça se passe dans ces cas-là : c’est le président de l’assemblée qui prend le relai. Ce sera donc à lui de gérer les médias. Nous on se concentre sur la scène de crime et sur l’enquête. On se débrouille pour n’avoir aucun préjugé. Évidemment, on va mettre le paquet sur cette enquête : ce n’est pas monsieur Duchmolle qui vient de mourir...Tout est bien clair ?»
Cette fois, il était bien réveillé, le commissaire : plus de doute, le président venait d’être retrouvé, mort, à l’Elysée...
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Le problème, avec un cadavre comme ça, c’est qu’il y avait des dizaines de pistes possible : des dizaines de mobiles, depuis Al Qaïda jusqu’au détraqué de base...
Ces derniers-temps, il y avait plusieurs options.
Celle à laquelle Valandier pensa tout de suite, c’était cette histoire de cette vieille dame très riche, patronne d’un groupe de la grande distribution, une des plus grandes fortunes de France, qui faisait tout pour payer le moins d’impôts possible tout en distribuant de l’argent à tort et à travers, en impliquant quelques ministres, quelques juges et, a priori, le président lui-même.
Ensuite, il y avait l’affaire des bombardiers de Corée en lien avec l’affaire «EauClaire». Le principal opposant du président était plus ou moins mêlé à cette sale histoire qui avait fait la une pendant plusieurs mois...On avait beaucoup évoqué le secret défense, ce qui est toujours suspect...
Il y avait aussi une affaire qui remontait au milieu des années 90 et qui avait été déclenchée par un attentat mystérieux et meurtrier : promesse de contrat avec le Boukistan, en échange d’argent pour financer une campagne électorale. Les contrats avaient été rompus suite aux élections perdues et pour se venger, le Boukistan aurait provoqué la mort de touristes français...
Enfin, on pouvait aussi penser aux terroristes de l’Ultra-gauche : des balles de révolver avaient déjà été envoyées au président et on se souvenait tous des tentatives d’attentat dans le métro et des arrestations qui s’en étaient suivies. Mais quand même ces histoires étaient bien moins sérieuses que les précédentes. Cependant, aucune piste n’était à négliger.
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Ce qui était étrange, cet été-là, c’était la persistance des médias : d’ordinaire, la presse sommeille doucement sous les marronniers, entre juillet et août, entre le Tour de France, le tour des plages et la tournée des festivals. Mais depuis juin, rien n’y avait fait : même la Coupe du Monde, ratée, il est vrai, n’avait pas réussi à faire tourner les yeux du public de ce qu’on appelait maintenant «le feuilleton de l’été».
C’était par là qu’il fallait commencer. D’ailleurs, assez rapidement, les autres pistes furent balayées. Valandier se retrouva chargé de la partie politique de l’enquête.
Le ministre de l’économie était le premier homme sur la liste. Cela faisait des semaines qu’il réclamait à corps et à cri une audition par la justice. Cependant lorsque Valandier téléphona à son cabinet, il eut beaucoup de mal à obtenir un rendez-vous. Il n’était pourtant pas en vacances puisque la France était sans dessus dessous suite à l'assassinat du président. Le ministre était entouré d’une dizaine de chefs de cabinet en tous genres qui trouvaient toujours de bonnes excuses pour repousser les rendez-vous : «C’est une époque troublée, il faut assurer l'intérim monsieur de ministre a dû reprendre des tas de dossiers...»
Quand Valandier obtint enfin un rendez-vous celui-ci ne fut qu’officieux, dans un café, ce qui ne fut pas sans rappeler certaines révélations du comptable de la vieille milliardaire.
L’homme était sombre, les traits tirés, le regard à la fois accablé et sur la défensive : cela faisait des semaines que la presse l’accusait de malversation, de népotisme, de corruption.
La première impression de Valandier fut presque de la pitié. Il se commanda un café, le ministre préféra un cognac.
«- A huit heures du matin, vous avez la santé monsieur le ministre, tenta le fonctionnaire de police, pour détendre l’atmosphère.
- Ça fait des nuits que je ne dors pas, il n’y a plus que l’alcool qui me fait tenir debout.»
C’était mal parti.
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Le cognac sifflé d’un coup, la cravate dénouée, l’homme d’Etat était près à se livrer. Valandier tâta doucement le terrain :
«- Je suis là pour l’assassinat du président. Comme vous le savez déjà, la piste privilégiée est celle de «l’affaire». Vous êtes donc en première ligne, c’est inévitable. Pour l’instant, ce que nous dirons dans ce café sera informel. Nous ne prendrons votre déposition au commissariat, ensuite. Mais il était important que nous nous rencontrions rapidement pour avoir votre première impression et pour nous faire la nôtre. Vous savez cependant que de nos jours, plus rien n’est «off»...
- Oui, je sais. Je ne le sais que trop bien. Fichu internet. En même temps, peut-être que c’est mieux pour la démocratie. Objectivement. Mais je ne suis pas très bien placé pour être objectif. Bon. Soyons honnête...»
Il eut alors une sorte de petit sourire piteux, entre l’ironie, l’auto-dérision et le dégoût.
«- Le jour du crime...
- La nuit du crime, interrompit l’inspecteur...
- Oui, la nuit du crime, j’étais avec mon épouse. J’ai un alibi. C’est tout ce que vous vouliez savoir, non ?
- Nous vérifierons. Mais ce n’est pas tout, non. Nous devons faire ensemble le tour des intérêts potentiels que vous auriez pu trouver dans le meurtre du président...
- Vous plaisantez ? Il a été le seul à me défendre et à me soutenir ! C’était mon meilleur allié, dans cette histoire : n’importe qui d’autre aurait exigé ma démission dès le début. Il a tout fait pour me tirer d’affaire, il a même demandé, en express, une enquête financière pour m’innocenter. Vous savez quoi ??? Vous feriez mieux de protéger ma vie, plutôt que de m’interroger comme un assassin ! »
Le ministre était totalement sorti de ses gonds. Il vociférait, dans le café où les habitués s’accrochaient au zinc en retenant leur souffle.
Le policier était perplexe : oui, le président l’avait soutenu, tout en promettant un remaniement ministériel plus tard, après l’été. Mais il avait aussi tenu ses distances, ces derniers jours. Il avait surtout tenu à marquer sa distance avec la milliardaire. Du genre : «Je ne mange pas de ce pain-là, moi...»
Quand ces objections furent faites, le ministre parut encore plus désemparé qu’auparavant.
« - Vous savez, moi, je suis un homme fichu, de toute façon. Ma carrière est terminée. Je suis fini, mort. Un scandale pareil...Toutes ces années perdues...que ce soit vrai ou pas, vous savez ce qu’on dit : il n’y a pas de fumée sans feu. A part me mettre à faire du théâtre ou des affaires sur internet, comme Tapie, je n’ai plus rien à perdre...»
Plus rien à perdre. Exactement ce que se dit un criminel quand il passe à l’action. Parfois.
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Quelques heures plus tard, c’était le commissaire lui-même qui prenait la déposition finale du ministre, dans son bureau. Finalement, on avait préféré bichonner un peu les personnalités. Pas de traumatisme, surtout pas de garde-à-vue sinistre. On avait déjà bien assez de problèmes : le climat français laissait à désirer, depuis le meurtre. On réclamait la vérité, on réclamait des élections, à gauche, on réclamait presque un putsch à la droite de la droite, on commençait à avoir peur, à se cloitrer dans les banlieues chics et à bouger beaucoup dans les banlieues moins chics.
Tout ça dans l’ambiance électrique d’un été caniculaire.
Il faut dire que le mois de juillet avait été tendu pour tout le monde : le défunt président était au plus bas dans les sondages de popularité. Il avait tenté l’agitation extrême. Il avait le jeu du tout sécuritaire, s’en prenant aux Rroms, aux immigrés, aux délinquants, aux récidivistes, aux jeunes...Bref, à tout ce qui faisait peur, d’ordinaire, à son électorat favori : les vieux.
Mais l’affaire Bassecourt ne faisait rien pour améliorer les choses. On criait même chez les anciens, au «Tous pourris».
La déposition et les déclarations médiatiques du ministre fut plus sobres que ses déclarations avinées du matin. "J'ai un alibi pour le jour du meurtre. J'ai toujours porté une admiration, un respect et une fidélité absolus au président qui m'a d'ailleurs toujours soutenu, la justice doit faire son travail, mais je n'ai rien à voir dans cette malheureuse histoire. Je tiens à nouveau à présenter mes condoléances sincères à Mme le président."
20/20 en langue de bois.
La deuxième personne à interroger, en attendant, c'était justement Madame.
A l'Elysée, la première dame de France recevait sans discontinuer des témoignages de souffrances partagées du monde entier, du showbiz entier, de la bonne société entière.
Elle jouait bien mieux la veuve éplorée que dans le dernier film de Woody Allen.
Elle était là, le soir du crime. Elle devait avoir des infos.
Le premier contact entre les enquêteurs et cette belle femme fut intimidant. Elle mettait de la distance, de la tristesse et des larmes dans chacun de ses gestes.
Elle déclara cependant que, selon elle, la garde de l'Elysée était en béton, normalement et que pour la franchir, il fallait être connu. Elle suggéra que les ministres avaient la permission de franchir les grilles. Mais elle balaya aussi cette hypothèse en déclarant que le gouvernement, bien sûr était parfaitement soudé, que tout le monde s'entendait très bien, que ces hommes et ces femmes passaient ensemble des moments formidables...Comme une équipe d'acteurs sur un tournage. Le genre de déclaration que les comédiens font sur les plateaux de télé, du moins...
Et puis, elle demanda quand elle devrait quitter l'Elysée. Elle ajouta qu'elle redeviendrait la saltimbanque qu'elle avait toujours été. Mais on savait bien qu'elle rejoindrait aussi vite que possible la luxueuse maison familiale du sud de la France.
Tout le monde semblait jouer un rôle dans cette histoire. Difficile d'en savoir plus, pour l'instant.
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Du côté de la scène de crime, les relevés et les photos faits, le labo de la police scientifique avait travaillé sans relâche, depuis deux jours. Mais il y avait bien peu de choses à dire. Le président avait été frappé de trois coups de couteaux portés par une personne plus grande que lui, de haut en bas. Le couteau, retrouvé à proximité ne portait pas d’empreinte et seulement le sang du président. On pouvait donc penser à un acte prémédité : l’arme avait été nettoyée.
Les traces repérées sur le sol étaient celle de chaussures de ville, a priori, mais le hall du palais de l’Elysée était un peu un hall de gare. Rien de particulier, en fait.
Et en plus, le labo de la police française, ce n’est pas les Experts Miami.
Il valait mieux continuer les investigations politiques.
On ne pourrait pas se dispenser d’interroger une fois de plus Mme Bassecourt. Elle avait déjà été entendue au coeur du mois de juillet par les enquêteurs. On avait pris toutes les précautions eut égard à son grand âge et à sa grande richesse : une des plus grandes fortunes mondiales, patronne de la plus grande marque de distribution française, elle avait l’habitude qu’on la bichonne. Elle le valait bien.
On a donc pris des pincettes, encore une fois. Mais un peu moins que la dernière fois : il y avait eu un mort, entre temps.
On a dû parler très fort, évidement, parce qu’elle était très sourde et qu’elle refusait de porter des appareils auditifs par coquetterie. Pourtant, elle semblait assez lucide et ses propos étaient clairs.
«- Donner des coups de couteaux, à mon âge, à un homme en pleine santé, vous vous doutez bien que ce n’est pas possible.
- Certes, mais pourquoi n’auriez-vous pas commandité ce crime ? Vous en avez les moyens et surtout, l’histoire des arrangements fiscaux nuisent beaucoup à votre réputation. Dans le commerce, c’est important, la réputation, Madame...
- La répudiation ? Mais quelle idée ? Ma fille se conduit avec moi...
- Non, la RÉPUTATION !
- Ah...Oh...à mon âge...
- Votre âge ne peut pas être la réponse à tout ! Quelle relation entreteniez-vous avec le président ?
- Quelle émission souhaiterais-je faire vraiment ? Ma foi, Drucker...
- Mais non, quelle relation entreteniez-vous avec le président ?» répéta Valandier deux fois plus fort.
- Ah...Oh...On s’est croisés quelques fois. Un homme charmant, au demeurant. Enfin, son épouse surtout. Lui n’avait pas vraiment de savoir vivre. Mais il est de bon ton, au Raincy, d’apprécier cet ancien maire. Il a sympathisé avec la bonne société : on l’appréciait, parce qu’on sentait bien que son avenir en politique était en bonne voie. Mais malgré cela, il ne fait pas vraiment parti du club. Il est tellement rustre, dans le fond : il ne connaît rien aux arts et aux lettres, il a tout d’un arriviste...Et son père ! Venu d’on ne sait où ! Mais enfin, il est utile, paraît-il...C’est ce que me dit toujours mon comptable, d’ailleurs !»
Elle s’était livrée plus qu’on ne pouvait l’espérer, finalement...
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Encore un témoin clé à interroger : le gestionnaire de la Mamie. On savait d’emblée la soupe qu’il allait servir : «Mon boulot, c’est de faire en sorte que ma cliente paye le moins d’impôts possible. Je suis très fort à ce petit jeu : je connais le code fiscal par cœur, jusqu’à dans ses moindres niches. Oui, on me paye très cher pour ça, mais le jeu en vaut la chandelle, au vu des économies que j’arrive à faire faire à la clientèle.»
Certes.
Mais les collusions et les confusions entre le pouvoir et l’argent étaient trop grandes pour être honnêtes.
L’homme était accoudé au bar d’un hôtel de luxe, lieu du rendez-vous avec Valandier. Il buvait une coupe de champagne. Une coupe de champagne, tout de suite, ça vous pose un homme.
Il avait vaguement un look oscillant entre baroudeur et vieux beau. D’emblée, il fit le petit couplet sur son job. Mot pour mot ce que Valandier avait imaginé.
«- Vous savez qu’on ne peut plus considérer cette affaire de la même manière depuis que le président a été tué ? D’ailleurs, je suis là pour l’enquête criminelle...,relança l’inspecteur.
- Oui. Alors là, justement : je ne comprends pas bien pourquoi vous voulez me voir ! Je suis comptable, juste un petit comptable...Je ne vois pas pourquoi je tuerai qui que ce soit...»
Un petit comptable. Deux minutes avant, il était payé comme le plus grand parce qu’il le valait bien. Facile de jouer la modestie quand ça l’arrangeait.
«- Soyons sérieux : le président avait lâché le ministre qui était votre principal contact. Il s’apprêtait à le virer du gouvernement à la rentrée. L'hallali avait commencé depuis pas mal de temps, déjà. Sans votre soutien au gouvernement, vous étiez vous aussi sous le feu des médias et de la justice...»
L’homme se rembrunit.
«- Mais de là à passer à l’acte...Certes, ma carrière aurait pris un coup dans l’aile...J’avais beau être...enfin...j’ai beau être le meilleur dans mon domaine, personne ne m’aurait embauché avec des soupçons pareils...»
Au commissariat, sa déclaration fut des plus lisses. Mais l’homme avait un brin de désespoir dans la voix.
Avant de partir, Valandier lui posa une dernière question :
«- Le champagne, tout à l’heure, au bar, c’était pour fêter quelque chose ?»
L’expert en fraude fiscale ne répondit rien, mais il eut un drôle de sourire en coin.
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On avait encore interrogé la femme du ministre. Elle était en fait l’alibi de ce dernier, sans surprise. Et ils avaient de toute façon été vus au restaurant de l’hôtel Crillon où ils avaient passé la soirée, jusqu’à 22h30. L’anniversaire de madame ? Quelque chose à fêter, en tout cas. Il faudrait vérifier.
Le légiste avait évalué l’heure de la mort à 23h, cependant...
Mais étrangement, tout le monde avait un alibi pour la soirée et même pour la nuit.
Fallait-il chercher ailleurs ?
Valandier, pourtant, lors des différents interrogatoires avait senti à chaque fois quelque chose. Il avait cru que c’était la veuve : sur le contrat de mariage, il n’était sans doute pas stipulé que son mari viendrait faire des scandales sur ses plateaux de tournage...
Puis, il avait été persuadé que le ministre se vengeait de sa carrière fichue.
Enfin, il avait eu l’intime conviction que le comptable était suffisamment amer pour passer à l’acte.
La femme du ministre l’avait conforté dans ses intuitions : elle faisait parfaitement le lien entre chacune de ces personnes. Elle avait été embauchée par le comptable, sur les conseils de son mari. Elle avait été une collaboratrice avisée de Madame. Elle avait aussi connu l’artiste qui était un ami intime des milliardaires. Enfin, de monsieur, surtout, parait-il, dans un premier temps, avant de se rabattre sur le dernier des vivants du couple, pour se faire coucher sur le testament, à défaut d’autre chose. Enfin, c’était une bonne amie de la première dame de France.
Elle était sans doute la clé de l’enquête : elle représentait à merveille toutes les collusions entre le pouvoir et l’argent. Elle était au carrefour des arrangements.
Le président aussi était le symbole de politique de classe, le symbole voyant du bling-bling assumé. Mais comme l’avait si bien expliqué la milliardaire, il ne faisait pas vraiment parti de ce monde, dans le fond. Il était bien trop voyant, en somme et représentait donc une menace pour la classe des riches.
Mais les pièces du puzzle avaient beaucoup de peine à se mettre en place.
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Ce qu’il fallait mettre au clair, tout d’abord, c’était la présence du président à l’Elysée, en pleine vacances.
Son épouse balbutia vaguement les mots «travail, dossiers des retraites, rentrée chaude»
Le ministre évoqua effectivement une réunion de travail qui devait avoir lieu à Brégançon, mais qu’on avait déplacée, finalement...Pourquoi ? Paris, c’est plus pratique, pour les médias et la justice...
Qui avait décidé que la réunion serait à Paris ? C’était étonnant, mais il semblait que c’était le ministre, pourtant fort en disgrâce.
Deuxième point à éclaircir : les alibis de chacun. Certes, chacun avait été vu dans des lieux publics jusqu’à 22 H 30. Mais si on en croyait le légiste, le crime avait eu lieu un peu après.
Après, le ministre et sa femme, qui mangeaient au Crillon, avaient marché, anonymes, au milieu de la foule de touristes du mois d’août, sur la plus belle avenue du monde.
Après, la première dame de France avait pris un livre et s’était retirée dans un des petits salons de l’Elysée. Toute seule avec le dernier Beigbeder...
Après, le comptable avait pris sa voiture pour aller en Normandie. Il avait roulé de nuit, et n’avait pas pris l’autoroute.
En y regardant de plus près, personne n’avait un alibi sérieux entre 22 h 30 et minuit.
Valandier, au hasard, releva les pointures des chaussures de tout le monde. Le labo avait bel et bien compté 7 traces de pas distinctes. Les gravillons de la cour de l’Elysée, c’était une vraie plaie pour les femmes de ménage.
Faisons le compte : il y avait bien sûr les pas du président, les pas de sa femme, qui avait accouru en entendant du grabuge, il y avait aussi les deux gardiens de la paix, arrivant un peu tard, pour découvrir le président lardé de coups de couteau. Il restait donc 3 empreintes non identifiées.
Bingo ! Les relevés collaient : les trois empreintes étaient celles du comptable, du ministre et de sa femme. Pas de doute.
Valandier et le commissaire convoquèrent tout ce petit monde.
Il était clair que le président avait été tué méthodiquement par trois symboles : les magouilles politiques, les magouilles financières et les magouilles pipolitiques...Car la première dame de France fut vite mise en cause par les trois autres.
Valandier dut faire une conférence de presse pour expliquer tout cela :
« Les prévenus ont avoué. Ils ont même dénoncé la femme du président qui a elle aussi reconnu les faits. Voilà comment s’est déroulé la scène : à 22 h 45, les gardiens de la paix en place sont remplacés par l’équipe de nuit. Il y a une minute de flottement. A ce moment-là, Madame s’est débrouillée pour faire rentrer dans le palais, le comptable de Mme Bassecourt et le couple ministériel. Ils ont rencontré le président dans le hall et par surprise et alors que l’homme ne se méfiait pas, le comptable a asséné un premier coup de couteau. C’était un peu comme si le monde de la finance assassinait un homme qui avait trop flirté avec lui, sans jamais parvenir à intégrer parfaitement ce monde. Ensuite, le poing serré sur le même couteau, Monsieur le ministre des finances et sa femme ont eux aussi donné un coup de couteau. C’était la reproduction concrète de tous les couteaux plantés dans le dos de ses adversaires politiques, tout au long des dernières décennies. Ces coups de couteaux lui avaient permis d’obtenir la meilleure place. Un coup de couteau le faisait tomber.
Enfin, le dernier coup de couteau, celui de son actrice de femme, avait été donné aussi pour souligner un des péchés de l’homme d’Etat : il aimait les flashs et les stars. On se souvenait de lui serrant la main d’un acteur hollywoodien, on se rappelait de ses apparitions contrôlées ou non dans Voilà ou dans WSD. Cependant, il ne faisait pas partie de ce monde. Elle l’avait prévenu, pourtant : il ne fallait pas qu’il se représente en 2012. D’ailleurs, leur contrat de mariage ne prévoyait pas d’aller aussi loin.»
Il avait été tué par là où il avait péché.
Au procès, les coupables plaidèrent qu’en leur âme et conscience, en détruisant ce tordu, ils étaient bien convaincus d’avoir servi la France.
On était dans l’embarras, alors on les condamna, puis on les amnistia. Et le pays reconnaissant les élut immédiatement chefs du gouvernement.
CC
c'est Gossouvre ?
RépondreSupprimerSi ça se trouve, Sarkozy est immortel.
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